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Historique rapide de l’Algérie
Jadis dotée de comptoirs commerciaux grecs et phéniciens sur la côte, puis occupée par les Romains, l’Afrique du Nord est envahie par les Arabes dès le VIIe siècle ; les Berbères résistent, se réfugient dans les montagnes et au Sud…
Au XVIe siècle : les frères Barberousse, corsaires turcs d’origine vraisemblablement sicilienne, participent à l’entrée de l’Algérie dans l’empire ottoman.
Juin 1830 : les troupes françaises conquièrent l’Algérie, mettant un terme à la domination turque (Leroy de Saint-Arnaud est nommé ministre de la Guerre le 26 octobre 1851).
Le 1sup>er novembre 1954 : une série d’attentats marque le commencement de l’insurrection, conduite par le FLN (Front de libération nationale), qui demande l’indépendance : c’est le début des « événements », autrement dit de la guerre d’Algérie.
Janvier 1957 : déclenchement de la « bataille d’Alger ».
Décembre 1960 : voyage du général de Gaulle en Algérie ; violents affrontements entre les partisans et les adversaires de l’indépendance.
Le 18 mars 1962 : les accords signés à évian, suivis le 19 d’un cessez-le-feu, reconnaissent à l’Algérie le droit à l’autodétermination par référendum.
A la fin des années quatre-vingt : l’instabilité gagne l’Algérie ; le mécontentement populaire profite aux partis intégristes.
Le 26 décembre 1991 : le FIS (Front islamique du salut) remporte le 1er tour des législatives ; le 2nd tour est prévu le 16 janvier.
Le 12 janvier 1992 : le Haut Conseil de Sécurité annule les législatives ; le Haut Comité d’Etat prend le pouvoir, présidé par Mohammed Boudiaf, qui sera assassiné le 29 juin. Commence alors une longue guerre civile, marquée pendant une décennie par de multiples disparitions et meurtres, notamment d’intellectuels.
MNA (Mouvement national algérien) : dirigé par le nationaliste Messali Hadj (1898-1974), le MNA était en désaccord avec le FLN.
Boudiaf Mohammed (1919-1992) : un des onze chefs historiques de la révolution, fondateurs en mars 1954 du Comité révolutionnaire pour l’unité et l’action.
Djaout Tahar : né le 11 janvier 1954 en Grande-Kabylie, il appartient aux écrivains de langue française formés après l’indépendance. également journaliste depuis 1976, il porte un regard critique sur la société algérienne. Abattu en pleine ville par des tueurs, il meurt à Alger le 2 juin 1993.
NB : dans Le Blanc de l’Algérie (Albin Michel, 1995), pleurant la perte de Tahar Djaout, Assia Djebar imagine deux tireurs fanatisés par un «émir» (p. 225-231). L’ouvrage évoque aussi d’autres personnalités assassinées en Algérie : Abdelkader Alloula (dramaturge, mort le 15 mars 1993 à 55 ans), Mahfoud Boucebci (psychiatre et auteur, mort le 15 juin 1993 à 54 ans), M’Hamed Boukhobza (sociologue et auteur, mort le 27 juin 1993 à 55 ans), Youssef Sebti (poète, mort le 27 décembre 1993 à 50 ans), une directrice de collège (morte en octobre 1994 à 45 ans), Saïd Mekbel (journaliste, mort le 3 décembre 1994 à 53 ans).
Lexique
Les termes arabes ou berbères du roman
abba, baba : papa
agha : chef
Ahram (al) : pyramide ; nom d’un journal égyptien
Aïd : fête
Allah akbar : Dieu est le plus grand
bab : porte
bahdja : belle, glorieuse
bi Allah, bismillah : au nom de Dieu
bilati : attends un peu
caïd : chef
casbah : citadelle
chaoui : berger (Chaoui : Berbère de l’Est)
dhor : prière du milieu du jour
ditié : poème
djebha : front
Djezaïr ; djezaïri(a) : Algérie ; algérien(ne)
França ; françaoui(a) : France ; français(e)
habib ; habibi : chéri ; ma chérie, mon chéri
hadj : celui qui a fait le pèlerinage de La Mecque
haïk : longue pièce d’étoffe rectangulaire dans laquelle les femmes se drapent
hamada : plateau pierreux du désert
houma : quartier
kebir : grand
Imazighen (mot berbère, pluriel de Amazigh) : « hommes libres », ainsi se désignent les Berbères eux-mêmes
keu-katt : petit gâteau de forme circulaire
khou : frère
khti : ma sœur
kouba : coupole ; sanctuaire surmonté d’une coupole
jenina : petit jardin
lla, lalla : madame
menfi : exilé (au sens politique)
mes’oul : responsable
meztoul : drogué
moudjahid(din) : combattant(s)
moustaqbal : avenir
nahda : réveil, renaissance arabe
ouali : saint
ouehch : nostalgie
ould, ouled : enfant(s)
Roumi : Européen, chrétien (vient de Rome, comme N’srani vient de Nazareth)
seghir : petit
si, sidi : monsieur
sout el Arab : voix des Arabes
tfel : enfant
ya : ô
zenkette, zankat : rue
Certains de ces mots sont entrés dans la langue française. C’est aussi le cas des substantifs harki (de l’arabe maghrébin harka : expédition, opération militaire) et zouave (du berbère Zwawa, nom d’une tribu kabyle).
Quant à l’adverbe « là -bas », fréquent dans le roman, les « pieds-noirs » (voir l’évolution sémantique de ce mot dans le Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, 1998 ; p. 2728-2729) l’utilisaient souvent pour désigner l’Algérie.
Le roman comporte aussi un certain nombre de mots rares, recherchés, spécialisés ou littéraires :
diapré (adj.) : de couleur variée et changeante
endogamie (nom fém.) : obligation, pour les membres de certaines tribus, de se marier dans leur propre tribu
feulement (nom masc.) : cri du tigre, bruit de gorge émis par le chat en colère
ganche (nom fém.) : virage
nochère (nom fém.) : celle qui conduit, dirige une embarcation
parentèle (nom fém.) : ensemble des parents
quinquet (nom masc.) : ancienne lampe
stances (nom fém. plur.) : poème lyrique d’inspiration grave (religieuse, morale, élégiaque) composé d’un nombre variable de strophes habituellement du même type
thrène (nom masc.) : lamentations, complainte funèbre
Quelques réactions de la presse algérienne
Voici un florilège de réactions de journalistes algériens, après l’élection d’Assia Djebar à l’Académie française. Elles permettrons de mieux comprendre, entre autres, comment l’auteure est perçue dans son pays :
• L’Expression, 18 juin 2005, N. Krim
« Une immortelle algérienne
L’élection de l’écrivaine algérienne Assia Djebar à l’Académie constitue une grande consécration pour la culture algérienne. »
• El Watan , 18 juin 2005, Rémi Yacine
« La littérature algérienne honorée : Assia Djebar à l’Académie française
L’auteure de L’Amour, la fantasia, Assia Djebar, a été élue vendredi à l’Académie française. Elle est la première personnalité nord-africaine admise parmi les quarante « immortels ». Considérée comme la plus célèbre romancière algérienne de langue française, Assia Djebar prend la place laissée vacante par le juriste Georges Vedel, disparu en février 2002. »
• Le Jeune Indépendant, 18 juin 2005, Belkacem Rouache
« Assia Djebbar élue à l’Académie française
On peut écrire dans une langue étrangère sans rompre avec ses racines. »
• Liberté, 18 juin 2005, Djamel Belayachi
« Elle fait désormais partie des “immortels†: Assia Djebar élue à l’Académie française
En posant sa candidature, l’écrivain avait “réfléchi […] à l’Algérie et aux années noires, à la décennie noire de 1990 où tant d’amis à [elle] francophones l’ont payé de leur vieâ€. »
• La Nouvelle République, 19 juin 2005, Hassina A.
« Assia Djebar élue à l’Académie française
Assia Djebar a été élue jeudi dernier à la prestigieuse Académie française, devenant ainsi la première personnalité d’origine maghrébine à faire son entrée chez les ‘‘immortels’’ depuis sa création en 1635.
Une juste récompense pour cette grande dame de la littérature algérienne. »
• El Watan, 20 juin 2005, Ameziane Ferhani
« Assia Djebar parmi les « immortels » : les palmes et le palmier
Bien sûr, pour se consoler, il est toujours possible de recourir au vieil adage, à portée de pensée, selon lequel nul n’est prophète en son pays. Mais Assia Djebar est écrivaine et femme de surcroît et, a priori, la formule ne lui sied donc pas. »
• El Watan, 23 juin 2005, Benaouda Lebdaï
« Une Cherchelloise parmi les grands
Nul n’est prophète en son pays. »
• Le Quotidien d’Oran, 23 juin 2005, Abdou B.
« Immortelle désormais, elle redonne de la fierté à des millions d’Algériens. Et si on expliquait par les moyens adéquats la portée de son Å“uvre et la portée de sa récente consécration, nombreuses par millions elles seront à pousser des youyous.
Par Assia, la preuve est faite que les femmes de ce pays ont de quoi donner de sacrées migraines à des docteurs ès bavardages. »
• El Watan, 28 juin 2005, Rachid Benblal
« Figure marquante de la littérature algérienne : sensibilité, couleur, simplicité
L’ Académie française vient de rendre hommage aux qualités intellectuelles d’Assia Djebar en l’appelant, le 16 juin 2005, à remplacer l’éminent juriste Georges Vedel. Qui donc eût pu prévoir que cette consécration suprême échût à une romancière algérienne ? Il y a de quoi pavoiser. Cette femme de grande valeur mérite qu’on lui adresse les plus enthousiastes compliments.
• El Watan, 21 juillet 2005, Ahmed Bedjaoui
« L’immortalité est plus forte que la frontière
Assia Djebar est donc devenue immortelle et tant pis pour cette capacité têtue que nous avons de banaliser les choses qui comptent au profit d’un quotidien fait de médiocrité fétide. Qu’importe les clameurs une fois tues. Car en entrant à l’Académie française, notre Fatima-Zohra Imalayène a secoué la torpeur sournoise de la culture officielle et créé l’un des rares événements nationaux dignes d’être cités. »
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Quelques réactions de critiques
• Note de l’éditeur Albin Michel, août 2003
« La Disparition de la langue française évoque le retour d’un homme en Algérie après un long exil. Pris au piège du souvenir, écartelé entre son éducation française, l’apprentissage de la rue dans l’Alger des années 50 et son engagement précoce dans la guerre d’indépendance, il ne reconnaît plus la terre natale… »
• La Nouvelle République, Alger, 18 octobre 2003, G.F.
« Auteur d’une dizaine de romans, récits, nouvelles, pièces de théâtre et de deux films, Assia Djebar, livre avec La Disparition de la langue française son onzième roman. Ce nouvel opus s’inscrit dans la lignée des romans imprégnés d’histoire récente, mais il innove en donnant le premier rôle à un homme […].
La Disparition de la langue française est un des plus beaux romans de cette rentrée. Il se signale à l’attention par la qualité de son écriture, par la justesse des traits de ses personnages et par son univers narratif original. Il faut le lire pour retrouver ou découvrir un auteur qui porte haut les couleurs des lettres algériennes. »
• Radio France Internationale, octobre 2003, Chronique livres
« La Disparition de la langue française est le dernier roman d’Assia Djebar. L’écrivain y raconte, à travers la voix d’un narrateur masculin, les années de la guerre civile et la descente dans l’enfer de l’intégrisme religieux et identitaire de son pays natal où elle n’est pas retournée depuis dix ans. »
• La revue Remue.net (http://www.remue.net), janvier 2004, Dominique Dussidour
« À la mémoire affective de Berkane, sensible aux odeurs et aux couleurs, aux gestes, aux visages, aux rencontres amicales, se mêlent peu à peu les images, les récits et les espoirs communs à tout un peuple. Et si les figures aimées de sa mère le berçant dans l’ancien patio, de la grand-mère aveugle, de son père et de son oncle semblent de plus en plus souvent lui échapper, s’effacer, dans le même mouvement de la conscience il se les réapproprie en tant que témoins historiques […]
La Disparition de la langue française est un beau roman d’Assia Djebar, un roman grave, où les voix du narrateur et de ceux qui l’entourent forment un des chÅ“urs romanesques les plus puissants de notre tragédie contemporaine. »
• Liberté, Alger, 19 juillet 2005, Slimane Aït Sidhoum
« Assia Djebar, qui a souvent dans ses romans donné la parole aux femmes, privilégie ici le point de vue d’un homme qui rentre au pays et vit la remontée de ses souvenirs d’enfance, écartelé entre éducation française et apprentissage de la rue. La Disparition de la langue française, c’est autant la disparition d’une génération ouverte sur l’autre que celle du français, véhicule sans doute d’une vision coloniale mais aussi porteur d’un universel de différence et donc de tolérance […].
Assia Djebar confirme qu’elle possède une écriture incomparable, sobre et méticuleuse, qui la classe parmi les auteurs majeurs de la littérature universelle.»
• Chroniques de Montréal, 27 juillet 2005
« ‘‘Je reviens donc, aujourd’hui même, au pays…’’ Cette phrase fait résonner une vieille nostalgie et résume toute une vie. Quelle qu’elle soit ! Quelle que soit sa couleur ou sa musique ! La Disparition de la langue française, c’est la disparition d’une époque que l’on ne peut restituer que par la mémoire. Le drama du monde est ainsi fait. Nous ne pouvons fondamentalement rien changer. […] Elle occupe désormais le fauteuil de Georges Vedel à l’Académie française. Commentant sa désignation au sein du distingué hémicycle, elle a considéré que l’Académie française avait rendu hommage à son « entêtement d’écrivain » et à son travail pour la francophonie. »
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